Ma première réponse à cette question serait immédiatement et sans aucune hésitation : Aucun rôle du Médecin du travail dans cette affaire ! et c'est purement et simplement le rôle du Médecin prescripteur de l'arrêt maladie, c'est à dire le Médecin traitant, qui est le seul habilité à autoriser une reprise prématurée des activités professionnelles. Sur un plan légal, tout employeur est tenu de s'opposer à un retour prématuré du salarié en l'absence de tout document médical justifiant de sa guérison.
C'était ma réponse théorique et médico-légale à la question fréquemment posée par les Services Ressources Humaines, les délégués syndicaux et certains Médecins (du travail ou traitants). Sur un plan pratique maintenant, j'observe et je croise tous les jours des situations et des comportements "bizarres" ou du moins "irresponsables" et de la part des employeurs ou de "mes amis les DRH", mais aussi de la part des salariés pour lesquels la tentation est parfois aussi grande pour ne pas perdre des indemnités ou pour faire preuve d'un présentéisme exagéré. Et il s'agit de ce genre de situations qui exigerait du Médecin du Travail de jouer son véritable rôle de Conseiller (juridique certes et non en hygiène et sécurité) mais conseiller de l'employeur quand même :
En une semaine, rien que 3 cas dans 2 entreprises différentes ont été portés à ma connaissance : Le premier, un salarié d'une multinationale en arrêt maladie pour 7 jours (syndrome dépressif mineur) contacté le 3ème jour d'arrêt par son manager par téléphone pour lui demander d'écourter son "repos" et rejoindre son travail parce que des tâches urgentes l'attendaient, ce qui fut fait par le salarié devant une indifférence totale du DRH. Le deuxième cas une entreprise privée du secteur tertiaire dont un salarié a présenté un arrêt maladie de 30 jours (appendicectomie) et qui a jugé de son propre chef de reprendre son travail au bout de 15 jours d'arrêt (officiellement parce qu'il allait très bien mais réellement pour ne pas trop perdre sur ses primes complémentaires suspendues par l'employeur en cas d'arrêt maladie) devant également une indifférence totale du DRH et de sa hiérarchie, cette dernière s'étant même permis le luxe de l'envoyer en mission une centaine de kilomètres au delà de son lieu permanent de travail. Et enfin le troisième cas d'une salariée de la même dite entreprise privée qui a repris son travail au bout d'un jour à la demande expresse du DRH en personne, alors que son Médecin traitant lui avait prescrit 4 jours de repos (syndrome pseudo-grippal) parce qu'elle était selon lui vraiment indispensable (mais encore en période probatoire au sein de l'entreprise) et qu'en cas de "moindre pépin" elle serait immédiatement raccompagnée chez elle pour se reposer : donc, en réalité elle demeurait en arrêt de travail tout en reprenant son travail ! Au total c'est du n'importe quoi et ce genre d'entorses manifestes à la réglementation ne cesseront qu'en cas de problème survenu au salarié puisque c'est l'employeur qui en assumerait les conséquences éventuelles.
Nous retiendrons donc que si un salarié souhaite reprendre son travail avant la fin de son arrêt de travail, il doit obligatoirement fournir de chez son Médecin Traitant un nouveau certificat médical à son employeur indiquant la nouvelle date de reprise du travail. En fonction du motif et de la durée de l'arrêt de travail, il peut être exigé du salarié une visite médicale de reprise du travail effectuée par le Médecin du travail en plus du nouveau certificat délivré par le Médecin Traitant (Mais dans tous les cas l'avis du Médecin du travail ne pourra pas remplacer l'avis du Médecin Traitant seul habilité à autoriser l'interruption de l'arrêt maladie), cette exigence obéit à la législation en santé au travail différente selon les pays, ainsi en France : la visite médicale de reprise s'impose désormais après une absence d'au moins 30 jours en accident du travail ou en maladie ordinaire, elle s'impose aussi au retour d'un congé de maternité et pour toute absence après maladie professionnelle ; par contre, en Tunisie : la visite médicale de reprise du travail s'impose plus fréquemment : en cas d'absences répétées (éventualité supprimée depuis 2012 en France), après une absence maladie de 21 jours ou plus, après accident du travail, maladie professionnelle ou maternité.
Enfin et détail assez important : inutile de vous rappeler par ailleurs que la Sécurité Sociale serait en droit de réclamer au salarié le remboursement des indemnités journalières versées en cas de reprise du travail non justifiée, ces indemnités ne pouvant en aucun cas se cumuler avec la rémunèration versée par l'employeur.